La Batna, ou meilleure alternative à la solution négociée, permet d’entamer sereinement la discussion.

Qui ne connaît pas la Batna (1), pierre angulaire de la négociation intégrative enseignée par la Harvard Business School (2) depuis les années ’80 ? Ce concept vise à conscientiser le négociateur sur l’importance de définir sa meilleure alternative à l’accord négocié et donc son point de rupture. Si chaque négociateur s’est bien préparé, il se dégage une Zopa, Zone of Possible Agreement, située entre les points de rupture des participants.

En pratique toutefois, ces concepts ne sont pas simples à manier car les négociations engendrent souvent des émotions difficiles à gérer. Voici quelques conseils pratiques.

1. Une bonne préparation

Tout commence par une bonne préparation. Identifier votre position de repli permettra d’entamer la négociation plus sereinement. Car si la discussion se tend, vous saurez jusqu’où aller. Concrètement, listez chacune de vos alternatives, évaluez-les en calculant leur valeur, choisissez l’option la plus valable et déterminez votre point de rupture. Faites le même exercice pour deviner la Batna de l’autre partie, même si c’est plus difficile.

2. Une Batna solide

Que faire si votre Batna n’est pas solide ? Bien souvent on a l’impression de partir en position de faiblesse. Ceci n’est pas anormal car si on était en position de force absolue, il n’y aurait pas de négociation. L’intérêt de la préparation consiste à renforcer sa Batna et relativiser celle de l’autre partie. Plus votre Batna est solide, moins vous en aurez besoin.

3. Renforcer sa Batna

Comment renforcer sa Batna ? Tout dépend bien sûr de la situation mais dans tous les cas, il s’agit d’un effort de créativité et d’initiative. Étudiez le marché et les prix, recherchez de nouveaux angles de vue, contactez d’autres amateurs potentiels, envisagez des solutions alternatives (recrutement, formation…) ou faites appel à un expert. Il faut que vos alternatives soient viables et précises, pour qu’elles puissent vous convaincre.

4. Travailler sur plusieurs axes

Sur quels axes peut-on travailler ? Le pouvoir de négociation dépend de multiples facteurs. La dépendance financière est un critère qui saute aux yeux, mais encore faut-il bien comprendre quels sont les éléments qui peuvent évoluer. Le pouvoir de l’influence, de la légitimité et de la réputation sont souvent sous-estimés. Comprendre l’importance du temps (à qui profite le statu quo ?) est également essentiel.

5. Agir subtilement

Faut-il divulguer sa Batna ? À nouveau, cela dépend du contexte et il faut agir subtilement. Révéler une Batna faible n’est évidemment pas une bonne idée, mais le bluff non plus car si l’autre partie s’en rend compte, vous avez perdu votre crédibilité. La mise en commun des informations, avec tact et respect, permet d’avancer, mais cela suppose un climat de confiance entre les parties. Dans tous les cas, évitez de divulguer votre BATNA trop tôt car cela pourrait être perçu comme une menace. Les menaces endommagent les relations.

6. Une arme à double tranchant

Lorsqu’elle est utilisée sans nuance, la Batna sera probablement mal perçue par l’autre partie qui aura pour réflexe de se cabrer. Inversement, il ne faut pas se laisser désarçonner si l’on met en doute la solidité de vos arguments. Soyez préparé à l’idée qu’on tentera de décrédibiliser votre Batna. Si vous montrez de la nervosité ou de l’irritation, votre interlocuteur saura que vous êtes en position de faiblesse. Par contre, si vous répondez avec aplomb et de manière réfléchie, vous augmentez les chances d’atteindre vos objectifs. La négociation fait partie de notre quotidien. Que ce soit dans un contexte privé ou professionnel, nous sommes tous amenés à prendre des positions et à défendre notre point de vue. Pourtant, de nombreuses négociations échouent ou laissent les participants insatisfaits. Vouloir passer en force est une stratégie dangereuse.

Pour « gagner » votre négociation, il faut privilégier l’écoute, le respect mutuel et une bonne préparation.

1) Batna est l’acronyme de Best Alternative To a Negotiated Agreement. En français : Mesore pour Meilleure Solution de Rechange.

(2) Le livre Getting to Yes par Robert Fisher et William Ury, publié en 1981, est l’ouvrage de référence pour la méthode de négociation dite de Harvard ou intégrative.

Article écrit par M. Tanguy della Faille
Médiateur agréé
tanguy.della.faille@fb-mediation.com