Plus de 75% des médiations civiles et commerciales aboutissent à un accord. Un processus qui permet de gagner du temps et de l’argent!

La médiation ne se réduit pas à la sphère familiale, même si elle y est particulièrement indiquée. Tout type de conflit entre personnes peut faire l’objet d’une médiation. Les entre- prises sont constituées d’hommes et de femmes qui vivent des émotions et peuvent entrer en conflit. Le processus vertueux de la médiation a d’autant plus de sens pour les entreprises que les enjeux y sont importants.

Une issue plus rapide et moins coûteuse. L’argument premier qui plaide pour la médiation, en particulier dans le domaine des affaires, est qu’elle permet une issue plus rapide et moins coûteuse que l’alternative judiciaire. Celle-ci est émaillée d’étapes qui s’apparentent souvent à une piste d’obstacles qui s’étend généralement sur de nombreuses années : conclusions d’avocat, expertises techniques, incidents de procédure, rapports d’évaluation de parts, lancement d’un volet pénal, etc. Ce qui semble simple au départ devient d’une complexité inouïe.

Construire une solution intelligente. Une autre vertu de la médiation, moins connue, est que les parties peuvent elles-mêmes construire leur solution. Celle-ci peut être créative, sortir du cadre du litige. Elle n’est pas contrainte par les principes juridiques ou par la vision d’un tiers (juge). Cet élément est particulièrement appréciable dans le monde des entre- prises, où des solutions pragmatiques et constructives peuvent relancer une nouvelle dynamique après l’accord de médiation.

Sortir de la spirale infernale. La spirale infernale du conflit décrite par Friedrich Glasl (cfr article dans La Libre du 23/3/2020) nous apprend que chaque partie a naturellement tendance à dévier vers un durcissement. On se sent incompris, atteint dans ses valeurs, blessé. On veut rendre coup sur coup, mail sur mail, argument sur argument. Alors,
on pose des gestes qui seront forcément mal reçus de l’autre côté, pour que l’autre “comprenne” bien ce que l’on ressent. Même les gestes d’apaisement peuvent, à un certain
stade, être perçus comme hypocrites ou intéressés. Ces comportements peuvent également être observés au sein des entreprises, qui sont finalement composées de personnes qui y consacrent une partie importante de leur vie.

La médiation d’entreprises. Les sources de con- flits peuvent être de différentes natures: problèmes au niveau du conseil d’administration ou entre dirigeants, conflits d’actionnaires (familiaux ou non), litiges commerciaux, etc. Lorsqu’un conflit s’installe, l’entreprise souffre : temps perdu en procédures, blocage des décisions, manque de stratégie, départ des collaborateurs… Pour les entreprises familiales, c’est encore pire, car l’entente familiale est mise en péril. Il n’est pas rare de voir de belles entreprises péricliter parce qu’un conflit n’a pas été géré convenablement.

Constat d’échec mais début de la réussite.

En acceptant d’entrer en médiation, les parties ont forcément fait le constat qu’elles n’arrivent pas à résoudre leur conflit sans aide extérieure. Il y a donc un sentiment d’échec, de gâchis à l’entame d’une médiation. Mais ce constat d’échec, s’il est accepté positivement, permet de reconstruire. Plus de 75 % des médiations civiles et commerciales (dont les médiations d’entreprises) débouchent sur un accord.

Le rôle du médiateur. Le médiateur est un tiers indépendant, impartial et neutre, qui a été formé pour guider les parties vers un accord. Il veille à créer un cadre apaisé où les parties peuvent de nouveau communiquer sereinement. Par la gestion des émotions, il permet que les parties échangent entre elles des informations utiles pour atteindre une solution satisfaisante.

Choix d’un médiateur d’entreprise. Comme pour tout type d’intervenant, nous pensons qu’il convient de choisir une personne qui connaît son sujet (*). Si le litige concerne des aspects financiers, fiscaux ou techniques, il sera difficile pour un médiateur non initié de discerner le vrai du faux dans le discours des parties. Bien entendu, il pourrait faire appel à un expert technique, mais cela alourdit et retarde la procédure de médiation. Il apparaît donc souhaitable de choisir un médiateur expérimenté et bien formé.

La médiation reste encore marginale dans notre pays. Vu ses nombreux atouts, reconnus par le législateur et par de nombreux juges et avocats, elle est certainement appelée à connaître un fort développement. Pour les dirigeants d’entreprises en particulier, la médiation devrait être un réflexe, car leur mission est d’aller de l’avant et se concentrer sur les vrais enjeux qui créent de la valeur.

Tanguy della Faille – La Libre Eco week-end – 24 avril 2021

(*) Il existe un courant de pensée qui estime que le médiateur ne doit pas connaître le sujet dont il a à traiter, ni préparer les séances, car son rôle se limiterait à veiller sur le cadre et laisser les parties discuter entre elles.